École des petits musiciens
Faire chanter et danser les enfants
La Presse
Apprendre aux enfants à lire une partition n’est pas urgent. Mais tous les enfants devraient « chanter et danser, tous les jours et tout au long de leur cours primaire », écrit Monique Désy Proulx dans
, paru récemment aux Éditions du CHU Sainte-Justine.« Je pose ma pierre dans l’édifice, pour qu’à un moment donné, les instances décisionnelles allument et disent : on doit mettre plus de musique dans nos vies, dit l’auteure en entrevue. C’est si clair, la musique apporte tellement de bienfaits aux enfants. »
Artiste multidisciplinaire, diplômée en musique, en sociologie et en pédagogie musicale, M
Désy Proulx s’est richement documentée pour écrire son ouvrage. « J’ai trouvé bien intéressant de voir les fondements scientifiques de ce dont on a l’intuition depuis des milliers d’années », indique-t-elle.« Faire de la musique modifie le cerveau et peut améliorer les fonctions cognitives et affectives, non seulement chez les jeunes enfants, mais aussi chez les aînés », confirme Isabelle Peretz, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en neurocognition de la musique à l’Université de Montréal, dans la préface de
Règle générale, les enfants qui étudient la musique obtiennent de meilleurs résultats à l’école. « Leur quotient intellectuel, le fameux QI, est souvent supérieur à celui des autres, en tenant compte de conditions de vie semblables concernant l’éducation des parents et les revenus familiaux », écrit M
Désy Proulx, citant une étude parue dans le en 2006.L’effet Mozart – soit la prétention que l’écoute de la musique de Mozart rend plus intelligent – n’existe pas précisément. Mais les gens réussissent bel et bien mieux aux tests cognitifs après avoir écouté de la musique, que ce soit du Mozart ou du Schubert, surtout en raison du plaisir qu’ils en retirent, selon une enquête de l’Université de Toronto.
95 % des musiciens dotés de l’oreille absolue ont commencé à faire de la musique avant l’âge de 7 ans. En Occident, 1 personne sur 10 000 possède cette aptitude. Source :
, de Monique Désy Proulx.« Les écoles offrant des programmes intensifs en musique affichent des taux d’abandon à peu près nuls, et elles forment des gens qui essaiment ensuite dans la société », écrit M
Désy Proulx. Le taux de décrochage au secondaire atteint 22 % chez ceux qui ne sont pas exposés à des activités culturelles, d’après une analyse de plusieurs grandes études faites par Hill Strategies. "Alors que seulement 4% des jeunes décrochent quand ils sont initiés aux arts en bas âge", souligne-t-elle.« C’est incroyable tout ce que le cerveau humain peut emmagasiner, comme information, quand ça passe par la musique, poursuit l’artiste. Le neurologue Oliver Sacks fait remarquer, dans
, que le Coran, c’est chanté. et l’ d’Homère, les gens les savaient par cœur parce qu’ils les chantaient. » Les enfants devraient chanter et danser pour apprendre les tables de multiplication, la conjugaison des verbes, les dates à retenir, suggère-t-elle.Faire de la musique protège même des maladies. « Nous libérons beaucoup d’immunoglobine A [un anticorps] lorsque nous chantons, surtout en groupe", écrit M
Désy Proulx. Une étude menée en Californie sur 32 choristes a noté qu’entre le début et la fin de chaque répétition, leur taux d’immunoglobine A augmentait de 150 %.Il faudrait davantage permettre aux enfants de s’exprimer par la musique, le chant et la danse, plaide l’artiste. « Notre société est beaucoup axée sur la parole, observe-t-elle. Se confier, parler de ce qu’on vit. La danse, c’est aussi un moyen d’exprimer ses émotions. Ce serait bien que les gars découvrent leurs corps, leur capacité de bouger, ça ferait des hommes moins névrosés ! Il y a des danses très viriles, comme le breakdance. »
« Le penseur et musicien français François Delalande m’a fait comprendre la triple dimension de la musique, relève M
Désy Proulx. C’est corporel, physique d’abord et avant tout. C’est relié aux émotions. Et ça donne accès au monde intellectuel. »L’auteure fait un « plaidoyer pour le folklore », ce lien entre le passé, le présent et l’avenir. « Nombre de petits sont incapables de chanter la moindre chanson d’enfant, regrette-t-elle.
, ils n’en savent même pas les paroles jusqu’au bout. »Or, si ces chansons ont traversé le temps, c’est « grâce à la prosodie, l’adéquation entre les mots et la musique, explique-t-elle. Ça reste une bonne façon d’apprendre les mots et la langue ». Pourquoi ne pas montrer aux enfants
?, suggère-t-elle. « Les chansons à répondre, c’est le fun ! »« La musique, ça apporte la joie, affirme M
Désy Proulx. C’est surprenant, à quel point ça apporte de la joie. Même quand tu es malheureux, surtout quand tu es malheureux. Des musiciens qui improvisent ensemble, 9 fois sur 10, ils éclatent de rire à la fin. Le mouvement, c’est une des lois de l’univers. Et la musique, ça nous permet d’être vraiment dans le mouvement. »